Forfait annuel jours

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Forfait annuel jours : si l’employeur ne prouve pas son contrôle de la charge de travail du salarié au forfait jours, le salarié peut réclamer des heures supplémentaires

La convention de forfait annuel en jours est une convention qui peut être proposée aux salariés, le plus souvent cadres, disposant d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps.

Il faut, pour ce faire, qu’un accord collectif (qui peut être une disposition de la convention collective) l’autorise et cet accord collectif prévoit des conditions précises.

La convention passée avec le salarié doit prévoir les modalités de contrôle de la charge de l’amplitude du travail du salarié.

L’employeur doit vérifier régulièrement que l’amplitude et la charge de travail du salarié restent raisonnables et suffisent à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié.

C’est à l’employeur d’apporter la preuve qu’il opère les contrôles exigés par l’accord collectif. A défaut, le salarié peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires.

L’affaire ayant donné lieu à l’arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 19 décembre 2018 en donne une illustration.

Un salarié, directeur commercial senior, contestant la validité de sa convention de forfait annuel en jours, avait demandé au conseil de prud’hommes le paiement d’heures supplémentaires.

Dans cette affaire, qui s’inscrivait dans le régime antérieur à la loi Travail du 8 août 2016, les juges du fond avaient estimé que l’accord collectif d’entreprise qui encadrait le recours au forfait jours instituait des garanties suffisantes pour vérifier que l’amplitude et la charge de travail du salarié restaient raisonnables et suffisaient à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié. Ils avaient donc rejeté la demande de nullité de la convention individuelle de forfait jours présentée par le salarié.

En revanche, ils ont estimé que le forfait jours était privé d’effet, dans la mesure où l’employeur ne respectait pas ces garanties.

Devant la Cour de cassation, une question de la charge de la preuve s’est posée :

  • était-ce au salarié, comme le soutenait l’entreprise, de prouver que l’employeur n’avait pas respecté les dispositions de l’accord collectif qui permettaient d’assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié en convention de forfait jours ?
  • ou bien, comme l’avait décidée la cour d’appel, était-ce à l’employeur de prouver qu’il avait respecté ses obligations conventionnelles ?

La charge de la preuve incombe à l’employeur. Lorsqu’un employeur ne respecte pas les garanties requises prévues dans l’accord collectif, le forfait jours est « privé d’effet », et donc inopérant. Le salarié peut donc prétendre au paiement de ses heures supplémentaires (cass. soc. 2 juillet 2014, n° 13-11940, BC V n° 172).

En l’espèce, l’employeur avait argué – mais pas prouvé – que la charge de travail et l’amplitude du temps de travail du salarié étaient appréciées tous les mois suite à la remise du bordereau de décompte des journées travaillées par le salarié, et à la fin de chaque quadrimestre à l’occasion d’un entretien se déroulant lorsque le salarié ne prenait pas ses jours de repos.

Pour la Cour de cassation, il appartenait à l’employeur d’apporter la preuve qu’il avait respecté les stipulations de l’accord collectif destinées à assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés en forfait en jours. Or celui-ci n’établissait pas qu’un contrôle de leur charge de travail et de l’amplitude de leur temps de travail était réalisé.

Par conséquent, la convention de forfait en jours du salarié était sans effet et le salarié pouvait solliciter le paiement de ses heures supplémentaires.(Cass. soc. 19 décembre 2018, n° 17-18725 )

Il convient d’être très vigilant sur ces conventions de forfait annuel en jours, il est conseillé de confier leur rédaction à un avocat.